lundi 21 septembre 2009

PPM ou le progrès en sursis



"La Martinique ne peut rester en marge d’une adaptation politique de fond
aux enjeux nouveaux d’un monde nouveau"
Serge Letchimi, Discours sur l’Autonomie.
La position du PPM (Parti Progressiste Martiniquais) dans le débat statutaire (c’est d’un bat-djol qu’il s’agit) qui secoue la Martinique, illustre bien la crise de rationalité que traverse notre société depuis septembre 1870. En effet, la position politique sortie de la convention PPM de Rivière-Salée, en fait il s’agit d’une alchimie politico-administrative sortie de la petite tête toute parisienne d’un commis de la République française, pour ridicule et incohérente qu’elle est, met au jour trois des insuffisances politiques majeures de la société-Martinique.
La première tient de la faiblesse de la culture politique Martinique et de la confusion générale autour du concept d’autonomie. Elle concerne également les plus chauds partisans de l’autonomie fiscale ou de la création d’une Collectivité d’outre-mer. Hier, jacobine à l’excès, (Etat unitaire centralisé) l’organisation administrative française glisse subrepticement vers un Etat unitaire décentralisé où les collectivités territoriales s’administrent de façon autonome mais restent soumises à la tutelle de l’Etat, soit par un contrôle à priori, soit par un contrôle à posteriori, sous la forme d’un contrôle de légalité. Les uns et les autres, les PPM, FMP, UMP-Martinique (partisans du statut quo DOM-ROM) et les pro-COM n’ont toujours pas réussi à comprendre qu’il n’y a pas d’autonomie politique et institutionnelle dans un Etat unitaire, fût-il décentralisé.
La deuxième insuffisance, plus politicienne, tient de la nature même du PPM, pompeusement promu au rang de « premier parti nationaliste martiniquais », qui revendique depuis sa création, une égalité sociale impossible et contraire au concept d’autonomie politique. L’on comprend que ce mot autonomie souffre toujours d’un adjectif qualificatif pour faire notion, L’autonomie est politique, institutionnelle, administrative, fiscale, etc...
La troisième insuffisance est liée à la méthode PPM. Incapable de se projeter, de penser la Martinique de demain puisque partisan d’une permanence du moratoire, d’amendement de tout projet autochtone, même le plus timide, le PPM (mais aussi les FMP/UMP-Martinique et quelques tafiatè et plantocrates féodaux locaux), la tête dans le volant n’arrive pas à conceptualiser l’idée de calendrier, or il ne peut y avoir de politique sans calendrier. Créer une Collectivité d’outre-mer, en fidélité avec l’évolution administrative française suppose une mise en œuvre, des négociations, des corrections, le grain sel du Conseil d’Etat, etc. C’est d’un processus qu’il s’agit, in fine, un ancrage de la culture politique locale mais à coup sûr, un effondrement de la conscience caribéenne en Martinique.
Sérieusement, comment peut-on revendiquer une Assemblée Unique dans le cadre de l’article 73 de la constitution française (l’application stricte du droit commun) quand depuis la loi du 2 mars 1982, l’organisation administrative française a distingué le département et la région de l’Etat en créant un exécutif élu ? Comment peut encore venir pleurer sur l’identité législative quand la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 confirme une compétence à légiférer des exécutifs des collectivités territoriales (commune, département, région) et donc leur compétence à adapter les lois françaises ? Créer une Assemblée Unique 73, même pour 5 ans, n’est-ce pas régresser de 30 ans et revenir au Conseil Général de feu Ti Momo ? Culture du moratoire ou culture du cancan politicien, quelles logiques politiciennes ont amené le PPM à vouloir nous ramené 30 ans en arrière ? La suppression des catégories juridiques DOM et TOM lors de la révision constitutionnelle de mars 2003 et leur remplacement par les catégories DOM-ROM (transitoire et valable seulement pour La Réunion) et COM, et la possibilité d’adapter les lois qui y est attachée (ce qui suppose le droit commun) ne désactivent elles pas la notion même d’identité législative ?
Cette tactique PPM est non seulement incohérente et ridicule mais surtout suicidaire et injurieuse en ce qu’elle nie le travail des élus martiniquais, en ce qu’elle prétend à l’instar du fameux mouvement social de février (mais c’était là juste une des contradictions de la revendication sociale en pays sans administration autochtone) faire un bond par-dessus les élus martiniquais et de la population martiniquaise, et enfin quand elle recopie une fantaisie parisienne d’un commis de la République française s’ennuyant dans l’immensité de son bureau ou ayant abusé des ti-punchs, elle gommerait toutes, disons, spécificités martiniquaises alors même qu’au sommet de l’Etat français l’on distingue déjà les outremers. La non-maîtrise PPM du débat et cette politique du chien et de la poule devant la banane (fig) montre, puisque l’identité législative est désactivée de facto dans un Etat décentralisé, une culture politique Martinique (et plus avant une culture Martinique) qui ne se renouvelle pas et tourne le dos à la modernité.

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