jeudi 5 février 2009

"Fanm fet pou respekte"



L’autodestruction menace la formation sociale Martinique. Les sociétés caribéennes post-esclavagistes et postcoloniales, notamment celles qui n’ont toujours pas réussi à façonner une superstructure politique, reproduisent une violence codifiée, directement héritée de la plantation esclavagiste, qui n’arrive pas à se retourner contre l’objet mais pénètre l’intimité même des familles.
Toutes les sociétés produisent et reproduisent de la violence, ici, là-bas, en tjou-man-deviran mais cette violence faite aux femmes de Martinique, trois femmes tuées en 48 heures par leur mari ou concubin/ex-concubin, menace jusqu’aux principes même du nous-martiniquais. C’est que cette violence conjugale, cette violence intracommunautaire, qui traumatise les enfants (tous les enfants dans le voisinage) et jusqu’aux aïeux, trahit une modernité parachutée qui n’a pas été faite dans cette anarchie coloniale intégrée. La modernité suppose l’individuation et forcément l’indépendance totale des femmes. Cette idée que Man Nònò peut réussir sa vie en dehors de la communauté de référence mais surtout sans le concours d’un misie Nònò et malgré un échec de la communauté de référence. Cette modernité là qui, dans le cas martiniquais, n’a pas pu faire mouvement sur elle-même et dont nous ne pouvons toucher l’origine (faire révolution avec, au sens d’un retour aux origines), doit s’appuyer sur des citoyens, des individus libres qui, le passé apaisé, se projettent sans retenue dans le devenir-monde.
Quelles dépendances vis-à-vis de leurs épouses/compagnes aliènent ces maris/compagnons pervers, psychotiques, tyrans d’un jour ou de tous les jours ? Quelles absences de repères et de pouvoir politique intégré empêchent une telle société d’endiguer durablement des phénomènes de violence intime ? Quels lieux de socialisation défaillants ou insuffisants (famille, école, associations, syndicats, entreprises, partis politiques) ont concédé cette violence privée ? Quelles spécificités de la violence domestique, comment circule-t-elle dans le phénomène global de la violence ?
Il faut une mobilisation politique immédiate qui lierait l’activité des institutions et la formation d’une action collective contestataire contre la violence faite aux femmes en Martinique. Mobiliser contre c'est relier, c'est faire société ; mobiliser tous les acteurs politiques, économiques, sociaux et culturels ; mobiliser toutes les ressources matérielles, spirituelles, culturelles et politiques pour remplir cette formation de l’anarchie coloniale intégrée de multiples lieux d’intégration politique, sociale et culturelle (entreprises, partis politiques, associations culturelles et sportives, cercles de voisinage, lawonn-bèlè, familles) qui travaillent au refroidissement immédiat de cette violence pathétique même si, nous l’avons toujours soutenu, seul un Etat martiniquais caribéennement intégré pourrait désarmer durablement toute ces violences. Il faut soigner cette société, hommes, femmes et enfants, bourreaux, victimes et traumatisés par la répétition, somme toute facile, de tels actes, Marie-Angèle, Sandrine, Manuela, Mélissa, Sandra et toutes ces femmes enlevées à la vie dans l’antre de l’amour ; en sorte de faire sortir un, des "relier" possibles et de penser/repenser jusqu’aux styles de vie intime.

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